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Publié par Pour une vraie gauche à Lannion

Nous continuons notre petite promenade au PS par ce petit bijou sur le dénommé Valls qui fut comme Hamon et Faure secrétaire des jeunes rocardiens...

http://www.regards.fr/politique/article/parti-socialiste-a-valls-toute

Parti socialiste : à Valls toute !

Accueil | Par Loïc Le Clerc, Pablo Pillaud-Vivien | 27 novembre 2020

Parti socialiste : à Valls toute !

Le vallsisme est-il l’avenir du PS ? La question paraît improbable, et pourtant, la garde rapprochée de l’ancien Premier ministre est en train de verrouiller le parti, avec la bénédiction d’Olivier Faure.

 

Après le quinquennat Hollande et les 6% de Benoît Hamon à l’élection présidentielle de 2017, c’était un euphémisme que de dire que le Parti socialiste était à bout de forces : au-delà de la question des cadres politiques qu’il n’a pas réussi à renouveler, laissant aux vieux éléphants toute latitude pour leurs turpitudes, c’est surtout sur l’écueil idéologique qu’est venu se fracasser le parti. Un temps marxiste puis anticapitaliste avant d’opter pour la social-démocratie, il est peu dire qu’il n’incarne aujourd’hui pas l’alternative crédible au libéralisme autoritaire du pouvoir en place.

Depuis le renoncement de François Hollande à se représenter, le Parti socialiste se cherche. Disposant d’un bataillon d’élus aussi nombreux que déboussolés, il a tenté plusieurs mues successives, sans grand succès. La première a été l’aventure d’anciens socialistes, dans la création de Génération.s : puisqu’on ne pouvait rien faire avec le PS en l’état, pourquoi ne pas tenter d’en proposer une évolution, mais depuis l’extérieur. Sans marqueur idéologique fort au-delà de la personnalité de l’un de ses fondateurs, Benoît Hamon, le nouveau parti tente de se faire le creuset de l’union des gauches et des écologistes. Au risque de devenir le PRG des écologistes.

Le Parti socialiste, c’est l’histoire d’une peau de chagrin qui voit un à un ses principaux animateurs quitter le navire : c’est Jean-Pierre Chevènement qui part en 1993 ; c’est Jean-Luc Mélenchon qui claque la porte pour créer le Parti de Gauche ; c’est Emmanuel Macron qui s’en va pour devenir président de la République en créant En Marche ; c’est Manuel Valls qui, infidèle à sa parole de soutenir le candidat désigné par la primaire, suit le futur locataire de l’Élysée ; c’est Benoît Hamon avec Génération.s. Nécessairement, pour les téméraires qui restent, il faut réussir à trouver une raison fondamentale pour continuer le combat au-delà de la normale inertie que ce type de parti-institution induit.

La République, c’est nous !

On aurait pu d’ailleurs croire que ce serait dans l’écologie que le PS aurait pu trouver son salut. À écouter le premier secrétaire du parti Olivier Faure, c’était d’ailleurs l’une des pistes envisagées, notamment dans l’immédiat post-européennes : se ranger derrière les écologistes et, par là-même, engager une refonte du logiciel socialiste pour aller vers la social-écologie. Seulement, c’était tirer un trait un peu rapidement sur le tropisme social-libéral que le parti avait failli prendre, sur les bons conseils de Bertrand Delanoë, quelques mois avant que n’éclate la crise financière de 2008.

Requinqué, dans une certaine mesure, par la réélection de nombreux de ses cadres dans les territoires aux dernières élections municipales, le PS est aujourd’hui entré dans une nouvelle phase : persuadés que les Verts n’auront jamais les épaules pour incarner une candidature digne de ce nom à la présidentielle, ravis du virage résolument à droite d’Emmanuel Macron et constatant que la radicalité de Jean-Luc Mélenchon n’est pas miscible avec leur programme, c’est tout naturellement que, de François Hollande à Anne Hidalgo en passant par Bernard Cazeneuve, Ségolène Royal ou même Jean-Christophe Cambadélis, tous se sentent (re)pousser des ambitions jupitériennes. Notez que la plupart ne sont plus franchement actifs au sein du PS. « Chez ces gens-là, il y a rarement de sincérité, souvent de la stratégie », nous glisse un cadre.

Seulement, il leur fallait trouver une raison pour pouvoir exclure toute alliance avec EELV qui commençait à devenir sérieusement menaçant. Et quoi de mieux que d’user des mêmes vieilles techniques que la droite : le procès en républicanisme. C’est ce dans quoi s’est vautrée la maire de Paris dans une interview sur BFMTV samedi dernier, allant jusqu’à mettre en péril l’équilibre de sa propre majorité au conseil municipal qui comprend 24 élus EELV.

À l’opportunisme politique évident s’ajoute aussi, de facto, la victoire idéologique d’un camp du PS que l’on pensait battu définitivement : celui de Manuel Valls. Celui derrière lequel les journalistes n’ont jamais cessé de courir malgré son départ pour Barcelone est loin d’avoir abandonné la bataille. Au contraire, il a largement essaimé, d’abord dans le champ médiatique généraliste où il réussit à être l’objet récurrent de toutes les attentions, mais aussi dans le champ politique de son ancien parti où ses anciens collaborateurs ou compagnons de route politique ont réussi à obtenir des positions stratégiques.

 

Car, si le tout nouveau secrétariat national du PS consiste, encore et toujours, en une armée mexicaine – « direction pléthorique » semble être l’expression en vigueur au sein du parti – réunissant tous les socialistes qui veulent bien rester encore à bord du Titanic, Olivier Faure est bel et bien encerclé de vallsistes : Carlos Da Silva, son directeur de cabinet ; Thibault Delahaye, son directeur adjoint de cabinet ; Marie Le Vern, la co-présidente du Conseil national ; Pierre Jouvet, à la commission électorale mais aussi au porte-parolat du parti ; Jérôme Guedj, en charge du pôle « laïcité et pacte républicain » [1]. « Ils sont tous proches voire signataires à la création du Printemps républicain, même Olivier Faure », commente un élu national, lequel déplore « la mainmise des vallsistes, qui pose problème à beaucoup d’autres ».

En fait, dès 2019, le premier des socialistes entame ce virage « républicain », la stratégie du PS consistant à se démarquer d’EELV et de LFI sur le thème République/laïcité. « Dans l’inflexion d’Olivier Faure sur le rapport à la laïcité et à la République, il y a clairement la patte de Carlos Da Silva, commente un conseiller socialiste. Fondamentalement, Olivier Faure n’est pas sur cette ligne républicano-laïque. Ça n’est pas son logiciel. Mais on lui a fait comprendre que, stratégiquement, il était préférable de tenir cette ligne pour marquer clairement la rupture avec Mélenchon. De la même façon qu’Anne Hidalgo l’a compris pour marquer la rupture avec une partie d’EELV. » Une position qui vise donc principalement à exclure toute forme de divergence sur ce sujet, en faisant non seulement croire que ce thème serait des plus clivants, mais en le prenant par son bout le plus radical. Le PS part du principe que s’il ne se différencie pas sur ces questions-là, il n’existe pas. Et puis, « le parti se renforce en s’épurant », comme disait l’autre. Au final, ça donne cette interview du premier secrétaire national à L’Obs, cette semaine : « L’ADN de la gauche, c’est la défense de la laïcité ». La priorité est donnée. Et ça n’est pas l’égalité. Pas plus la justice sociale.

 

L’idée de fond, c’est de faire quelque chose des dégâts causés par le quinquennat Hollande et la razzia Macron. Que faire de ces débris pour que le PS renaisse ? Olivier Faure commet une première erreur, de diagnostic : « Emmanuel Macron a repoussé son grand discours sur le sujet, gêné dans sa matrice anglo-saxonne et multiculturaliste. Or, il est nécessaire aujourd’hui de réaffirmer un cap dans le cadre républicain », lit-on dans Le Monde en novembre 2019. Rien n’est plus faux que de confondre le candidat Macron et le Président Macron. Mais les socialistes ont leur part de responsabilité dans les choix d’Olivier Faure. À ne pas se précipiter pour le soutenir, ils ont laissé le champ libre aux vallsistes. Ces derniers ont alors noyauté le parti, se faisant « garde prétorienne » du premier secrétaire, lequel en est devenu finalement très dépendant. Pas étonnant alors que Faure envisage d’aller chasser sur ces terres, dont on ne perçoit pas bien les frontières, si ce n’est que sont déjà présents dans la mêlée LREM, LR et le RN. À droite toute !

C’est donc via le vallsisme que le PS envisage son avenir. En opposition aux islamo-gauchistes. Sans nuance possible, sans même que cette stratégie ait été débattue.

Was ist Vallsismus ?

Le vallsisme, au-delà d’être une idéologie qui pestifère le Parti socialiste, est une stratégie politique. Il n’aime pas la démocratie. Souvenez-vous, l’une des lois les plus controversées de ces dernières années : la loi Travail, dites loi El Khomri. Pas de débat. Un 49-3. Non pas qu’il récuse la démocratie, mais ses expériences électorales se finissent si souvent en échec qu’il a pris une autre voie : le copinage et les nominations qu’elle permet.

Un exemple ? Lors de la primaire citoyenne de 2011, qui désignera François Hollande candidat du PS à la présidentielle de 2012, Manuel Valls obtient 5,63% des suffrages (soit 149.103 voix). Il arrive avant-dernier, devant le radical de gauche Jean-Michel Baylet, ce qui fait de Manuel Valls le dernier des socialistes. Croyez-vous que cette déroute l’empêcha de devenir ministre de l’Intérieur sept mois plus tard, et Premier ministre en 2014 ? Non.

Fort de sa stature d’homme d’État, il se relance en 2017 dans la primaire citoyenne du PS. Cette fois-ci, il pète le score : avec 31,9% des suffrages (521.238 voix, son record personnel toute élection confondue), il se hisse au second tour et… perd face à Benoît Hamon. Alors, la main sur le cœur, il brise sa promesse de soutenir le candidat du PS et file chez Macron. Le slogan de sa campagne des législatives – sous l’étiquette « majorité présidentielle » – résume bien le personnage : « Toujours avec vous ». On connaît la suite, un an plus tard il quitte l’Assemblée nationale pour tenter sa chance à Barcelone. Conclusion : Manuel Valls ne gagne qu’à Évry. Tout le reste n’est que nomination.

Le vallsisme, outre une stratégie de loser-gagnant, c’est aussi un style : l’invective. Souvenez-vous encore de ce grand moment parlementaire lorsque le ministre de l’Intérieur lance à la droite : « C’est vous qui avez échoué et les Français aujourd’hui payent dix ans d’une politique de sécurité faite de lois qui n’ont servi à rien, qui n’ont pas été appliquées. L’esbroufe, c’est vous, l’échec c’est vous, la hausse de la délinquance, c’est vous. [...] Le retour du terrorisme dans ce pays, c’est vous ! » Des propos qu’il avait regretté par la suite… Il faut dire que le Valls d’avant est toujours très dur avec le Valls d’après. Tiens, saviez-vous que Nicolas Sarkozy l’avait approché pour qu’il entre dans son gouvernement ? L’homme de gauche avait dit non, pour cause de « désaccord de fond avec sa politique économique », ajoutant « dans cinq ans, s’il me repropose quelque chose, on verra ». Un détail… Passons.

C’est que le « girouettisme » est également une des qualités du vallsisme. Ainsi l’on peut, étant dans la Team Valls, passer de pro-palestinien à pro-israélien. Ainsi peut-on faire campagne contre le référendum de 2005 et voter pour. Ainsi peut-on soutenir Hollande en 2005 et Royal en 2006. Tout ceci est du Valls pur jus. Et les « Valls boys » ont suivi les préceptes du maîtres : Pierre Jouvet était candidat « majorité présidentielle » aux législatives de 2017 – malgré le refus répété de l’investiture LREM – ; Carlos Da Silva a fait la campagne de Manuel Valls après que ce dernier a quitté le parti. « Quand ils ont fait le bilan des années Hollande, tous ces gens-là ont joué la carte de la trahison causée par l’épisode de la déchéance de la nationalité. Mais tous ces gens-là ont fait campagne pour cette déchéance ! », abonde un parlementaire.

Ce n’est pas le vent qui tourne… Pas étonnant qu’ils s’entendent si bien avec Aurore Bergé !

Le PS se rêve-t-il un avenir dans le vallsisme ainsi dépeint ? À vrai dire, ils ont bien tenté l’aventure macroniste, mais le macronisme n’a pas voulu d’eux. Ne restait qu’un astre mort du haut duquel ils se voient déjà briller. Bons élèves, ils ont retenu les leçons du passé : pas la peine d’aller aux élections, trouvez-vous un chef qui vous nommera quelque part. Pour le moment, c’est Olivier Faure qui leur fait la courte-échelle. « "Amuse-toi Olivier avec ton joujou, mais tout ça se réglera plus tard"... c’est l’ambiance du moment au PS. Ça ne se voit pas, mais il y a une bataille sourde en interne, ça hurle », nous glisse-t-on. Les autres socialistes réagiront-ils ? En auront-ils seulement les moyens ? Et, surtout, qu’en feront les électeurs ? Quand c’est flou au PS...

 

Loïc Le Clerc et Pablo Pillaud-Vivien

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