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Publié par Pour une vraie gauche à Lannion

https://aoc.media/analyse/2024/02/27/emmanuel-macron-un-revolutionnaire-conservateur/

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Politiste

Trop souvent le débat – et la polémique – autour de la dérive « illibérale » de la France est réduite à la seule figure du président de la République. Quelle que soit l’hybris jupitérienne de ce dernier, son action s’inscrit dans un jeu de forces, à la fois synchronique et diachronique, dont il est souvent le simple jouet. Il est plus important de réfléchir à des enchaînements complexes de circonstances contingentes et hétérogènes qui enclenchent, dans des situations historiques concrètes, de nouvelles configurations.

L’injonction d’Emmanuel Macron à ses ministres de se montrer non « gestionnaires » mais « révolutionnaires » peut prêter à haussement d’épaules. On peut y voir aussi une manifestation supplémentaire du grotesque qui lui tient lieu de style politique dès lors que sa prétention à être lui-même « révolutionnaire » va de pair avec la répression policière de tous ceux qui se le disent également, avec plus de crédibilité que lui-même.

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Néanmoins, il nous faut prendre au sérieux cette pétition de principe « révolutionnaire » dont il se pourrait qu’elle nous fournisse la clef d’intelligibilité du macronisme. Après tout, Emmanuel Macron a intitulé son ouvrage de première campagne présidentielle Révolution. Il se réclamait de temps nouveaux et entendait rejeter dans les poubelles de l’Histoire le vieux monde, non sans accents évangéliques de born again de la République (ou de la monarchie ?). Volontiers « disruptif », il se veut homme de rupture et, pourquoi pas, de transgression, en l’occurrence des « tabous », un mot récurrent dans son discours. Il se rêve en président d’une start-up nation pour mieux se gausser des « Gaulois réfractaires ».

« En même temps » il se dévoile en conservateur profond. Il assume sans gêne les poncifs les plus éculés du roman national. Orléans, le Mont-Saint-Michel, le Puy du Fou, Notre-Dame de Paris délimitent sa géographie historique. Il reprend le vocabulaire traditionnel de la droite et souvent de l’extrême droite en répondant à l’explosion sociale des banlieues par la pensée magique de l’ « autorité », en se dressant contre l’immigration, en luttant contre les narcotrafiquants par l’organisation d’opérations « place nette » dont on a vu l’inanité en Amérique latine ou aux Philippines, en s’imposant dans la sphère intime de la famille pour contrôler les écrans des ados et augmenter le nombre des bébés, et en œuvrant pour que la France « reste la France » quitte à paraphraser Éric Zemmour. Il assume désormais la remise en cause du droit du sol, fût-ce à doses homéopathiques.

Par ailleurs sa « révolution » est surtout celle du capitalisme, en vue de sa systématisation à l’ensemble de la vie sociale, et au prix d’un siphonage radical du secteur public au bénéfice du secteur privé dans les domaines de la santé, de l’éducation, des transports, de la vieillesse, de la petite enfance, de l’administration. Chef de l’Etat, Emmanuel Macron est le fondé de pouvoir d’Uber, d’Airbnb et de McKinsey dont il aimerait simplement que les opérateurs soient des chouans ou des bâtisseurs de cathédrale.

 

Le slogan initial du macronisme, sous couvert de ricœurisme mal digéré, doit donc être pris au sérieux, et au pied de la lettre. Il s’agit d’être à la fois conservateur et révolutionnaire. Son attitude à l’égard de l’homosexualité est éloquente de ce point de vue.

Une part de son entourage politique le plus proche partage cette orientation sexuelle, à commencer par le Premier ministre, Gabriel Attal, et le nouveau ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, lesquels ont d’ailleurs été compagnons « pacsés » en bonne et due forme de 2017 à 2022. Mais ce personnel politique gay friendly affiche des valeurs et un imaginaire politiques profondément conservateurs au point d’introduire dans la législation française la « préférence nationale » chère à la famille Le Pen, dont la loi contre l’immigration du 19 décembre a assuré la « victoire idéologique », de son propre dire. L’amour entre garçons, pourquoi pas, mais en uniforme et sans abaya.

Ce en quoi le macronisme ne se démarque pas autant de la droite ou de l’extrême droite qu’on pourrait le penser. Le premier ministre notoirement homosexuel dans un gouvernement français fut nommé par Giscard d’Estaing, le premier député à faire son coming out fut un chiraquien, et Marine...

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