Le référendum du 25 octobre 2020 pour changer de Constitution est déjà une victoire pour les manifestants de la Révolte populaire (du 18 octobre 2019 à mars 2020) et le résultat est sans appel.
L’ « apruebo » (j’approuve un processus de changement de la Constitution) a obtenu 78,27 % des voix, contre le « rechazo » (je rejette).
Sur ceux qui ont approuvé, 86,67 % ont choisi la Convencion Constutionnal (contre l’autre option : la Convencion Mixta )
A Paris, pour les Chiliens de l’étranger : Apruebo : 70 % puis, la Convencion Constitucional : 93 %
Une véritable Assemblée Constituante, chargée de rédiger une nouvelle constitution, composée de 155 constituants, sera élue le 11 avril 2021. Elle sera paritaire (fruit de la participation active des féministes à la Révolte) et comprendra des délégués des peuples indigènes (mapuches)
Freins posés par la classe politique déconsidérée et corrompue : les politicards avaient tenté de s’accrocher aux branches avec l’option « convencion mixta ». Ceci aurait été un un paradoxe : l’Assemblée Constituante aurait inclus des députés actuels, comme membres constituants, à hauteur de 50 % pour …. changer la Constitution (et 50 % de citoyens) ; la majorité pour agréer les articles de la Nouvelle Constitution est fixée à 2/3 des voix : seuls les partis peuvent présenter des candidats aux postes de « constituants », ce qui exclu les organisations citoyennes ; un veto contre toute modification des traités internationaux Pour y répondre, le « Frente Amplio » (coalition de gauche anti-libérale) a décidé d’ouvrir la moitié des candidatures aux citoyens non adhérents aux partis.
Manifestation contre le gouvernement 8 novembre 2019
Origine du processus de nouvelle Constitution :
La revendication d’une nouvelle Constitution existait déjà dans les manifestations des étudiants de 2011-12 : partis d’une exigence d‘une « éducation gratuite et de qualité », ils s’étaient politisés et réclamé une nationalisation du cuivre (comme du temps d’ Allende et de l’Unité Populaire de 70 à 73) et une nouvelle constitution pour remplacer celle de Pinochet datant de 1980 (durant la dictature, entre le coup d’État du 11 septembre 1973 et le NO au référendum de Pinochet en 1988). Ce fut la première génération a ne pas avoir connu la dictature, ce qui explique leur courage et inventivité. Quelques retouches avaient été apportés par les gouvernements « démocratiques » (du parti socialiste aux démocrates-chrétiens) sans écorcher le cadre économique et social ultralibéral de Pinochet, conseillé par les « Chicago Boys » : fonds de pensions, casse du code du travail, du droit de gréve et du syndicalisme, privatisations (et corruption des militaires) des firmes et du cuivre, éducation et santé et protection sociale privatisées, libre-échange...voir Naomi Klein (La Stratégie du Choc). La société actuelle chilienne est parmi les plus inégalitaires au monde : 1 % de la population détient 26 % du PIB et 50 % des travailleurs touchent un salaire < à 505 €.
Le résultat du référendum constitue une claque contre toute la classe politique actuelle figée (les mêmes familles-castes dirigent le pays), déconsidérée et corrompue : un système injuste binominal (favorisant les coalitions) avait pourtant été remplacé par un scrutin proportionnel par Michèle Bachelet.
« No son 30 pesos, son 31 años » (ce n’est pas l’affaire d’une hausse de 30 pesos des tickets de métro mais l’affaire de 30 années de gouvernements au service du capitalisme). La Révolte sociale, démarrée par des lycéens, a été massive, permanente du 18 octobre 2019 à mars 2020 (covid oblige), inventive, libérant la parole : occupations de rues, agoras, auto-organisation du peuple, gréve générale du 12 novembre 2019. Le président Piñera (droite) a répondu par la répression, dénoncée par Michéle Bachelet, commissaire aux droits de l’homme à l’ONU : 26 morts, 11 500 blessés, 20 645 détenus (soutenus par le collectif de parrainage des prisonniers politiques de la Révolte (créé en février 2020), viols, couvre-feu...puis a accordé quelques miettes sociales, avant de proposer, pour sauver son existence-même, un référendum avec l’accord des autres partis (dont une partie du Fente Amplio) du 15 novembre 2019.
La nouvelle Constitution ne va pas régler les problèmes économiques et sociaux du pays, n’est pas forcément la fin du néolibéralisme, mais va ouvrir des perspectives de changement politique. Grâce au peuple révolté et mobilisé durant 5 mois. A lui de poursuivre sa mobilisation et son auto-organisation.
Michel BLIN Lannion, le 3 novembre 2020. (1 voir note Huma Lannion)
26 octobre joie populaire
Note Huma Lannionnaise à partir du mensuel Bretagne- Ile de France, journal de l'USBIF (Union des Sociétés Bretonnes d'Ile de France) fondé par Jean Le Lagadec.
Michel BLIN
Michel Blin,, ancien conseiller municipal de la ville, est bien connu à Lannion et dans le Tregor par ses engagements syndicaux (Solidaires22) et politiques (Ensemble) .
Michel Blin et le Chili
Son expérience remonte loin. Présent à Santiago à ce moment là, il a assisté à l’ataque du palais présidentiel puis a été arrêté par l'armée, il témoigne. Etudiant en agronomie de 24 ans il était venu voir de ses propres yeux la réforme agraire engagée par le gouvernement socialiste de Salvador Allende. Ce 11 septembre 1973, l'ordre est donné par les putschistes de prendre d'assaut le palais de la Moneda, résidence du président de la République du Chili.
Michel Blin assiste à la scène depuis sa chambre d'hôtel. "Il donnait directement sur le palais présidentiel, détaille-t-il. J'ai vu les tanks s'approcher dupalais, au départ je croyais qu'ils venaient défendre le président Allende. Mais après les avions ont bombardé la Moneda."Pour Michel Blin, la suite des événements va se compliquer. Deux jours après le coup d'État, des militaires investissent l'hôtel où il réside, perquisitionnent et l'arrête en compagnie des autres étrangers présents sur place. Sans aucun motif connu, il suppose que "pour le nouveau régime, les étrangers présents au Chili étaient suspects, de potentiels guérilleros."Après une demi-journée au commissariat "les mains en l'air", le prisonnier politique rejoint les autres détenus au Stade national. L'enceinte est transformée en camp pour environ 40 000 prisonniers. Certains y mourront. Michel Blin y restera quinze jours avant d'être libéré grâce à la pression diplomatique française et l'aide la Croix Rouge Internationale. Il témoigne régulièrement par des exposition ou des entretiens à la presse.
Michel Blin aujourd'hui et à l'époque où il est témoin du coup d'Etat de Pinochet contre le peuple chilien et le gouvernement d'Allende