Une candidature communiste, ce serait une candidature franchement communiste donc 100% anti UE – par Antoine Manessis PRCF
Une candidature communiste, ce serait une candidature franchement communiste donc 100% anti UE – par Antoine Manessis
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Photomontage et caricature de la Conférence Nationale du PCF – 5 novembre.
Réunis en conférence nationale le 5 novembre à Paris, les délégués du PCF PGE ont approuvé à 90% la résolution proposée par la direction du PCF-PGE. S’agissant des présidentielles, cette résolution proposait également deux options. Soit un soutien à la candidature Mélenchon en restant indépendant de la France Insoumise. Soit la proposition d’une candidature communiste qui pourrait être effacée en février une fois le résultat de la primaire PS connus. Aucun nom n’étant d’ailleurs cité officiellement, mais la tribune de la Conférence Nationale citant les noms de André Chassaigne et Pierre Laurent, le camarade Gauthier Weinmann, par exemple, étant obligé de forcer la parole depuis la salle pour rappeler sa candidature totalement occultée par la direction du parti. www.initiative-communiste.fr publie les textes de ces deux options ci dessous. Le résultat des votes de la conférence nationale du PCF est le suivant, la décision appartenant aux adhérents du PCF qui voteront dans leurs sections du 24 au 26 novembre : sur 535 inscrits officiels, 519 ont pris part au vote (97%), 218 soutiennent la candidature de Mélenchon (42%), 274 une candidature autre investit par le PCF et pouvant s’effacer en février (53%) et 27 se sont abstenus (5%). Il faut constater que l’écart est très serré. Deux autres options, attendre février 2016 d’une part, et d’autre part proposer une candidature communiste sur des bases de classes, ont été rejetées largement par la conférence nationale préalablement à ce vote.
A PROPOS DE LA CONFÉRENCE NATIONALE du PCF-PGE (partie de la gauche européenne)
Une candidature communiste, ce serait une candidature Franchement communiste et 100% anti UE
par Antoine Manessis (PRCF)
Tout en refusant l’option tardivement soutenue par Pierre Laurent d’un soutien critique à Jean-Luc Mélenchon, le vote émis à 55,7% par la Conférence nationale du PCF-PGE en faveur d’une candidature PCF appelle plusieurs remarques :
Le premier aspect est que ce vote politiquement hétérogène exprime sans doute, pour certains camarades d’orientation marxiste, la nostalgie (certes honorable et légitime) d’une authentique expression communiste lors de ces présidentielles qui restent structurantes pour notre vie politique (et cela quoi qu’on pense de la Vème République à bout de souffle). Certains militants évoquent avec raison la campagne magnifique menée par Jacques Duclos en 1969 sur la base d’un vrai contenu communiste (progrès social, indépendance nationale, perspective du socialisme, solidarité avec le camp anti-impérialiste mondial…) ou, à un moindre degré, ils pensent à d’autres candidatures qui, permirent par la suite de porter peu ou prou les solutions des communistes devant notre peuple.
Pourtant une autre partie des 55% s’exprime surtout, hélas, un repli identitaire à vide (car qu’est-ce que l’orientation présente du PCF a encore de communiste ?) sans autre perspective que l’affirmation butée d’une candidature PCF-PGE plombant celle de Mélenchon, laquelle est interprétée mécaniquement comme une pure réplique de celle de Mitterrand en 81. Or il existe une « petite » différence entre 81 et 2017 : Mitterrand avait réussi à supplanter la gauche ouvrière et patriotique représentée par G. Marchais en déséquilibrant durablement le rapports des forces entre PCF et PS au profit de ce dernier ; à l’inverse, la candidature actuelle de JLM qui, certes fut membre du PS… mais qui s’oppose à lui sur sa gauche, suscite l’angoisse justifiée des « éléphants » du PS ; car ceux-ci savent que leur parti discrédité risque fort d’éclater avant la fin 2017 si, au premier tour des présidentielles, il est talonné, voire distancé par une candidature se réclamant de l’opposition de gauche. Une candidature posant du moins (de manière certes très inconséquente pour qui mesure le degré de verrouillage de l’UE !), la question de quitter l’UE et refusant par avance de pactiser avec Hollande ou avec l’un de ses ex-ministres (ce à quoi aboutira nécessairement la « primaire » socialiste… que n’exclut pas de rallier le PCF, y compris après le vote de sa conférence nationale) au nom de » l’union des gauches ». A l’inverse, comme on l’a encore vu aux dernières municipales, le PCF, devenu la section hexagonale du Parti de la Gauche Européenne (PGE que préside Pierre Laurent et que subventionne Bruxelles) a tout fait depuis 1981, y compris sabordé l’identité et l’influence communistes, pour ménager l’hégémonie PS post-mitterrandien dans le vain espoir que cette « servitude volontaire » préserverait ses « grands élus » dépendant du désistement socialiste au second tour des législatives (voire au 1er tour des municipales). Par conséquent, qui peut croire qu’une candidature émanant de la direction duPCF-PGE, sans contenu communiste, sans la moindre interrogation sur l’appartenance de la France à l’UE et sans autre effet que d’assurer mécaniquement au PS le maintien au premier tour de sa suprématie à gauche, puisse remettre en cause l’équilibre délétère conquis par Mitterrand en 1981 ? Le raisonnement de certains camarades flirte en l’occurrence avec le contresens historique !
Pour d’autres votants du 5 novembre, le confort d’un entre-soi, même à 1 ou 2%, le cabotage au long de rives électorales bien balisées, est préférable à l’aventure d’une traversée en pleine mer avec tous ses aléas (« qui craint le loup n’aille pas en forêt ! », aimait dire Lénine…). Il y a là une grave erreur de méthode : alors que notre peuple souffre, qu’il est menacé de fascisation, de choc néo-thatchérien et de décomposition nationale, alors que tous les militants communistes et progressistes sont guettés par un second tour présidentiel de cauchemar, des marxistes attentifs au sort du pays, de la classe ouvrière et du véritable communisme, ne devraient pas fonder toute leur réflexion sur le sauvetage à tout prix d’un appareil en faillite pour penser l’avenir du pays, du communisme et de la classe ouvrière. C’est l’inverse qui est vrai : c’est parce qu’ils auront réussi à apporter du neuf, en particulier une stratégie émancipée de l’ « union de la gauche » derrière le PS et porteuse d’une nouvelle dialectique de la classe ouvrière, de la souveraineté populaire et du socialisme, tout cela sans mépriser les dynamiques réellement existantes, que les communistes pourront à nouveau intéresser la classe ouvrière, interpeller la jeunesse populaire, parler à l’ensemble du peuple. Ce qui implique de prendre la tête d’un front antifasciste, populaire, patriotique et écologique autour des deux drapeaux (rouge et tricolore) et pour les quatre sorties (de l’euro, de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme). Rappelons à ce sujet la manière éminemment dialectique et dynamique dont Marx définissait l’identité communiste : « nous appelons communisme le mouvement qui abolit l’état de choses existant ». Rappelons en outre que dans toute l’histoire communiste française et internationale, il n’y a jamais eu lieu d’opposer la construction du parti communiste et la construction d’un large front contre les monopoles capitalistes, les deux s’épaulant mutuellement.
Pour certains enfin, un calcul tactique et électoraliste prime derrière l’emballage « identitaire » : il s’agit, comme a tenté de le faire Pierre Laurent depuis des mois, non de porter une véritable alternative révolutionnaire, non de présenter aux travailleurs un programme communiste visant l’euro-rupture (ce qui, par contraste, sera la tâche prioritaire du PRCF durant toute la période pré électorale), mais de géner la candidature de JLM, de devenir ainsi les obligés « communistes » d’un PS talonné sur sa gauche ; puis, fort de ce glorieux état de service, il s’agit d’obtenir ainsi « donnant-donnant » un retour d’ascenseur du grand frère PS aux législatives (par ex. des candidatures uniques de la « gauche » au premier tour pour sauver quelques députés PCF sortants ?). Ainsi André Chassaigne, le président du groupe PCF à l’Assemblée nationale, a-t-il crûment expliqué dernièrement qu’il ne donnerait pas une signification identitaire à son éventuelle candidature présidentielle, mais qu’il se présenterait surtout, au final, et peut-être très provisoirement, pour aider à « rassembler toute la gauche », Mélenchon étant accusé de « diviser la gauche », comme si Hollande et ses ex-ministres relevaient encore de cette étiquetage douteux. En clair, une telle candidature d’apparence identitaire servirait au final, après un « tour de piste » plus ou moins long du candidat ou du pré-candidat étiqueté PCF, à rabattre sur le PS, soit au premier, soit au second tour des présidentielles… pour ensuite faire bloc avec lui aux législatives, peut-être même dès le 1er tour si le PS en perdition y consent ! Étrange manière de combattre l’héritage de Mitterrand … et de Hollande-MEDEF ! Comme candidature communiste « identitaire », on peut décidément rêver mieux, que ce soit sur le plan tactique ou sur le plan du contenu !
Pour les militants franchement communistes en revanche, la question devrait comporter deux aspects : d’abord, qu’est-ce qu’une candidature PCF-PGE peut apporter de dynamisant après vingt ans de mutation réformiste continue (l’abandon du marxisme-léninisme par le PCF date déjà des années 70 !) ? Ensuite, quelle attitude adopter lors des présidentielles pour permettre aux communistes véritables de promouvoir leurs propositions de rupture progressiste avec l’UE dans la classe ouvrière ? Après une consultation des ses militants, et sans cesser de tendre la main aux militants franchement communistes qui subsistent minoritairement au sein du PCF, le Comité Central du PRCF donnera prochainement son appréciation en toute indépendance sur ces deux questions. Reste que l’on peut dès maintenant souligner quelques faits dont il faudra bien tenir compte :
1.lorsque P. Laurent déclare qu’un candidat communiste pourrait, « si la situation l’exige », se retirer au profit d’une « candidature commune d’alternative à l’austérité », on constate que la perspective d’une entente avec le PS reste totalement d’actualité, que la « candidature communiste » reste conçue comme un tremplin vers le « rassemblement de la gauche » (y compris au premier tour de la présidentielle !). On constate aussi que la victoire de Montebourg aux primaires du PS peut à tout moment rebattre les cartes dans le sens souhaité, jusqu’à il y a peu, par la direction du PCF-PGE
2.comment ne pas s’interroger sur ce que serait le contenu politique et social d’une candidature du PCF-PGE en l’état des orientations euro-réformistes fixées lors de ses derniers congrès ? Comment croire qu’A. Chassaigne ou que tel autre « candidat communiste » émanant de la direction du PCF-PGE puisse porter une perspective communiste sans, au minimum, une prise de position carrée sur la sortie de l’UE-euro-OTAN ? Comment la section française du Parti de la Gauche Européenne, que préside Pierre Laurent et qui a soutenu Tsipras contre le PC de Grèce, y compris après la trahison avérée dudit Tsipras, pourrait-elle subitement porter une ligne de classe et patriotique pour la sortie de l’UE et l’affirmation d’une perspective révolutionnaire ? Et n’est-il pas illusoire, malgré l’entière bonne foi de certains excellents camarades du PCF qui croient encore à cette possibilité, de s’imaginer qu’une candidature PCF peut être COMMUNISTE alors que tout l’état-major du PCF-PGE traite dédaigneusement de « repli identitaire » la revendication d’indépendance de la France ? A moins que n’émerge une candidature franchement anti-UE (que ne manquerait pas combattre frontalement le président du PGE (P. Laurent) et qui, en conséquence, scinderait ouvertement ce parti) objectivement, une telle candidature serait, en l’état, à la droite de Mélenchon dont la formule, insupportable aux oreilles de P. Laurent, est bien : « l’UE, on la change ou on la quitte».
Car jusqu’ici, le PCF-PGE et son socialiste favori, A. Montebourg, combattent à boulets rouges la simple hypothèse de sortir de l’euro et de l’UE. Rappelons que le PCF et l’Humanité ont combattu à boulets roses le Brexit (imposé par la classe ouvrière anglaise !) et que toute cette fine équipe tire à vue sur le mot d’ordre de frexit-frecsitFREXIT progressiste mis en avant par le PRCF. Si bien que ce serait un mauvais calcul pour de vrais communistes que de parrainer une « candidature communiste » (sic) étiquetée PCF sans l’associer au préalable politique d’un contenu communiste… et sans se soucier outre mesure de l’avenir du mouvement populaire ! Au contraire il faut subordonner l’idée d’une candidature communiste à celle d’un CONTENU communiste sans dire de manière quelque peu « pragmatique », « on achète le produit sur l’étiquette, on verra chemin faisant le contenu du flacon ! ». Mais cette position juste (pas de candidat communiste sans contenu communiste 100% anti-UE), qui permettrait pour du bon de « prendre de gauche » la candidature de Jean Luc Mélenchon, supposerait que l’on ose affronter la direction du PCF, y compris sur le terrain électoral. Et cela mènerait aussi – soyons clairs puisqu’il s’agit de l’identité communiste et du PARTI communiste – à envisager sans frilosité une séparation organisationnelle à brève échéance avec la direction mutante : tant il est évident que cette dernière ne supporterait pas une candidature euro- et socialo-indépendante. A l’inverse, une candidature PCF sans contenu ne préserverait qu’en apparence l’espace de la reconstruction communiste, tout en plombant à coup sûr celui d’une dynamique populaire ; en prime, et à moins de ne la souhaiter que pour mieux l’envoyer au casse-pipe (par une sorte de politique du pire), elle reporterait aux calendes grecques la question de plus en plus incontournable de faire renaître en France un vrai Parti communiste ; c’est-à-dire un parti marxiste-léniniste, prolétarien, patriote et internationaliste, en un mot, ce parti d’avant-garde qu’a liquidé depuis longtemps la « mutation ». Bref, une candidature PCF dans le cadre du maintien de la France dans l’UE risque de s’avérer « perdante-perdante » sur les deux terrains, celui de la dynamique populaire possible et déjà partiellement existante, mais celui aussi de la renaissance communiste proprement dite.
Plus largement c’est en termes de dynamique politique plus qu’en termes d’étiquettes que toutes ces questions doivent être posées.
Certes, on peut feindre de se retirer sur l’Aventin pour « témoigner »… quitte à constater ensuite que, hélas, la direction du PCF et son candidat « communiste » plus ou moins jetable rabattent au final sur le PS, sur l’ « Europe sociale », voire sur des candidatures uniques de la gauche aux législatives ; mais qu’adviendra-t-il ensuite du découragement populaire si l’élection présidentielle, suivie d’une élection législative non moins confuse, n’aboutit qu’à des résultats désolants tous azimuts : score « communiste » dérisoire, inférieur même à celui des chapelles trotskistes réunies, maintien de l’hégémonie PS sur le mouvement populaire (après tout ce que Hollande nous a fait !), duo infernal LR/FN au second tour, pluie de mesures fascisantes et thatchériennes dès le printemps avec le risque d’un mouvement populaire échec et mat sur tous les terrains ?
En résumé, on peut croire qu’il suffirait d’une étiquette sur le front « candidat communiste » pour que la citrouille rosâtre se mue soudain en un rouge carrosse, mais si l’on ne croit pas aux contes de fées, on sait que derrière le vernis écarlate, la cucurbitacée restera ce qu’elle est.
On peut croire que le PS est « un parti de gauche » et que le principal est de sauver le député Ryan, mais quoi après ?
On peut aussi se dire en revanche que la reconquête d’un espace politique à la gauche du PS, qui ne peut être qu’un espace vivant, donc contradictoire, d’affrontement de classes croissant entre petite bourgeoisie européiste et gauche populaire et patriotique, pourrait créer une situation politique nouvelle offrant aux communistes la possibilité de mener offensivement le combat de classe ; et aussi, pourquoi pas, de se poser enfin pour du bon, la question de reconstruire un vrai parti communiste regroupant les forces internes et externes au PCF, au lieu d’espérer sans fin en la résurrection d’un appareil muté, euro-formaté et aussi déboussolé que déboussolant.
Nous savons pourtant, au moins depuis 1933, que les conditions dans lesquelles se mène la lutte, surtout dans une période de fascisation où le mouvement populaire, y compris syndical, est en grave danger, ne sont pas indifférentes aux révolutionnaires et qu’il ne faut jamais opposer l’intérêt du mouvement populaire dans son ensemble à l’intérêt bien compris des communistes. Méditons pour finir le mot du Manifeste du Parti communiste : les communistes, y déclaraient Marx et Engels, « n’ont point d’intérêt qui les sépare de l’ensemble du prolétariat (…). Dans les différentes phases que traverse la lutte entre prolétaires et bourgeois, ils représentent toujours les intérêts du mouvement dans sa totalité ».
Antoine Manessis – 7 novembre 2016