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Publié par Danielle Bleitach via l'Humanité lannionnaise

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https://histoireetsociete.wordpress.com/2016/12/08/la-responsabilite-de-la-gauche-dans-lalternative-fillon-le-pen-par-danielle-bleitrach/

08 Déc

 

Robert Ménard : «Fillon, c’est la victoire de nos idées»

•Par Marc de Boni Le Figaro

•Mis à jour le 07/12/2016 à 07:46

•Publié le 06/12/2016 à 16:13

Hier le Figaro consacrait un article au « turbulent maire de Béziers » qui, selon l’article, « souhaite convaincre Marine Le Pen de réviser son approche des électeurs de François Fillon, inquiet de voir une partie de l’électorat conquis par le FN lui échapper. » Il est trop facile aujourd’hui de se boucher le nez devant le personnage, mais pourtant revenir quelques années en arrière permet de comprendre comment et pourquoi nous en sommes arrivés à assurer la promotion de cet individu et cela a certainement un rapport avec la débâcle de la gauche, la quasi disparition des enjeux de la présidentielle du PCF et l’alternative incroyable entre un Fillon et une Marine Le Pen, dont l’enfant incestueux est incontestablement un Robert Ménard. Mais d’abord reprenons ses propos et son analyse tels que les rapporte le Figaro.

 

 

«Il est le plus dangereux pour le FN», disait de François Fillon Marion Maréchal Le Pen, interrogée le 23 novembre dernier par l’Association des journalistes de la presse parlementaire. Un danger, surtout pour la composante conservatrice et identitaire du parti: le candidat de LR pour la présidentielle vient directement lui disputer une partie de son électorat. Pour se différencier dans la campagne, le FN se voit tenté de porter l’effort sur les questions sociales, en d’autres termes: favoriser la ligne portée par Florian Philippot. Une perspective qui n’est visiblement pas du goût du maire de Béziers, Robert Ménard. Cité par Marianne, l’ancien journaliste voit de nombreuses convergences entre les options qu’il défend et celles du nouveau chef de file de la droite.

 

«Sur un bon nombre des idées de François Fillon, je suis d’accord. Sur les questions de société et de politique internationale notamment. Sur le plan économique, son programme libéral me semble assez bien, à condition qu’il ne soit pas mis en place au détriment des plus faibles», confirme au Figaro Robert Ménard. «Pour la primaire, beaucoup de mes amis sont allés voter pour François Fillon. Il est clair qu’entre lui, Sarkozy et Juppé, il n’y avait pas photo. Moi-même, si j’avais voté, j’aurais choisi Poisson au premier tour et Fillon au second», ajoute l’élu apparenté FN.

 

«Je voterai Marine Le Pen»

 

Une proximité qui n’est tout de même pas de nature à modifier les choix de Robert Ménard dans le contexte de la présidentielle. «François Fillon, c’est la victoire de nos idées, c’est une droite conservatrice assumée. C’est exactement ce que porte “la droite hors les murs”. Mais ce sont de belles idées portées par le mauvais cheval», regrette Ménard. «Le problème, c’est que je ne crois pas une seconde qu’il mettra vraiment en œuvre ce qu’il propose. Il a été ministre de Sarkozy pendant cinq ans, et à ce titre il a entériné des décisions qui sont contraires à ses choix actuels. C’est pour cette raison que je voterai Marine Le Pen pour les élections de 2017», poursuit l’édile.

 

Robert Ménard milite auprès de la présidente du FN pour une approche moins frontale des revendications portées par l’électorat filloniste. «J’ai parlé avec Marine Le Pen de son positionnement vis-à-vis du candidat LR. Il faut qu’elle fasse attention, parce que beaucoup de ses électeurs sont désormais tentés par le vote Fillon. Ça paraît injuste parce que c’est par exemple elle qui a la position la plus claire sur le mariage pour tous. Mais les catholiques ne lui en portent pas crédit. C’est parce qu’elle s’entoure de gens qui font un effet repoussoir, comme Florian Philippot. Sa comparaison du débat sur le mariage pour tous avec la culture du bonzaï, ça a laissé des traces», indique Robert Ménard, adversaire de longue date du vice-président du FN. Une chose est sûre, l’un des premiers effets Fillon, c’est l’apparition de nouvelles fissures dans la cohérence idéologique du Front national.

 

Les positions de Robert Ménard ont visiblement soulevé un certain émoi au Front national, au point que le maire de Béziers a tenu à publier mardi en fin de journée sur Twitter une vidéo explicative

 

Un peu d’histoire : comment les médias, la gauche et la direction du PCF se sont reconnus en un Robert Ménard

 

Certes si nous en sommes aujourd’hui à avoir comme perspective l’alternative des mêmes, au point que Ménard lui même n’y reconnait pas son candidat, c’est d’abord et avant tout à cause du calamiteux quinquennat de Hollande et de son premier ministre Manuel Valls, avec au centre de la division irréconciliable de la gauche la loi El Khomery, qui est en fait la loi Valls-Macron. Mais cet épisode dans lequel la police de la république, le 49.3 liberticide ont été mobilisés contre la majorité de l’opinion française et une bataille exemplaire de plusieurs mois, n’est pas le seul. Tout a été fait pour faire mordre la poussière à ceux qui constituent ce qu’on appelle d’un vocable contestable le peuple de gauche pour éviter de noter qu’il s’agit du monde du travail et des exploités autant que ceux qui s’estiment héritiers depuis la Révolution française d’une vision progressiste de la République.

 

Mais cela a été dit et analysé par ailleurs, je voudrais simplement, à travers le cas Robert Ménard, aller plus avant dans le temps: pour entrevoir ce qui nous a permis d’élire Hollande qui n’a rien eu de plus pressé que de désigner une politique, et des gens pour la mener qui à l’intérieur de son propre parti ne représentaient même pas 5%, tant ils étaient inféodés au patronat.

Il faudrait décrire la manière dont le PS s’est constitué avec l’objectif premier d’en finir avec la dimension révolutionnaire et de classe de la gauche. J’insiste souvent sur le fait que Hollande a refusé de désigner un membre de la Résistance communiste pour entrer au Panthéon, cherchant quelque socialiste égaré pour représenter cette résistance. Cela n’a rien d’anecdotique. C’est un choix qui poursuit celui de Mitterrand, dont le moins que l’on puisse dire est qu’il a pratiqué tous les compromis avec le pétainisme. En fait, cet anticommunisme historique a été et reste le seul ciment idéologique de ce PS, qui est désormais le meilleur allié du patronat. S’il prétend conserver quelques traits d’un passé révolutionnaire, il le doit de moins en moins à la social-démocratie telle qu’elle existait dans le Nord et le Pas de Calais, mais de plus en plus à l’entrisme trotskiste. Ce dernier a toujours eu pour objectif au meilleur des cas la rivalité avec le PCF, la démonstration de son caractère « criminel » puisqu’ils sont les « staliniens ». Notez que Robert Ménard, quand il officiait contre Cuba puis contre les jeux olympiques à Pékin (avant de rallier le Qatar) se présentait lui même comme un trotskiste. La division du PS aujourd’hui reste dans ces rails et l’anticommunisme demeure fondamental, qu’il s’agisse du ralliement à l’atlantisme et au néolibéralisme ou de ses anciens trotskistes. On a pu le voir récemment avec l’étrange attitude d’une partie importante de la social-démocratie au retour de Ségolène Royale des funérailles de Fidel Castro et leur indifférence au voyage en Arabie saoudite de Hollande. La manière dont ils ont de fait appuyé les cris d’orfraie de la droite. Leur anticommunisme transfiguré en « anti-stalinisme » les a conduit dès le début à appuyer les « combats » d’un Robert Ménard contre Cuba.

Est-ce qu’on se souvient de Fabius en appelant aux mannes d’Allende pour mener l’assaut contre l’ambassade de Cuba aux côtés de Robert Ménard dans les colonnes du Nouvel observateur? Est-ce que quelqu’un se souvient de l’opération du Théâtre des Champs-Elysées où une intelligentzia jadis communiste et rendue courtisane par Mitterrand et son maître de cérémonie des paillettes et strass Jack Lang s’était rendue massivement pour crier avec Robert Ménard « Cuba si, Castro no » dans toutes les rues et places de Paris. Publicis avait payé des panneaux sous verre où on voyait le profit de Fidel avec le slogan Cuba si, Castro no et l’invitation au théâtre des Champs-Elysées.

C’est peu dire que le PCF, sa direction, à l’époque Marie-Georges Buffet a témoigné de son absence de courage dans le soutien à Cuba, c’est une litote et si je rappelle souvent qu’à l’époque Patrick le Hyaric, déjà directeur de l’Humanité a accepté de parrainer un faux « dissident » journaliste et un vrai espion de la CIA cubain, alors que Ménard lui-même avouait ses liens avec ladite CIA. Je le sais d’autant plus que c’est de cette époque que date mon interdiction et celle de la publicité autour de mes écrits dans l’Humanité. La direction du journal semble et c’est tant mieux avoir changé de ligne et ce qui est moins bien avoir oublié ce qu’elle a pu faire. Le défaut d’autocritique étant la meilleure propension à reproduire les errements, d’ailleurs elle tient à ses ostracismes et continue à assurer un maximum de publicité à ceux que les médias sociaux-démocrates et de droite lui désignent comme des valeurs sûres.

 

L’absence d’autocritique ne concerne pas que les directions de la gauche, l’adhésion autour de la campagne d’un Robert Ménard a été massive, j’avais entrepris de prévenir les intellectuels, que l’on pouvait considérer comme proches du parti, qui était l’individu et je me souviens encore des réactions, de la manière dont j’étais accusée d’être une « stalinienne ». La pire fut sans doute Ariane Ascaride, son enthousiasme face à un Robert Ménard ne connaissait pas de bornes. Lavilliers lui signait un article dans l’Huma, un torchon où il dénonçait « l’automne du patriarche », le lendemain même du jour où le terrible cyclone Michelle dévastait l’île exsangue où on ne trouvait plus rien à manger. Je ne veux pas la mort du pêcheur mais je souhaiterais que cela le rende plus prudent.

 

Si je décris tout cela ce n’est pas pour flageller la gauche et les communistes, surtout ces derniers puisque dans la masse du parti ils ont été les seuls à se battre envers et contre tous pour défendre Cuba, mais pour bien marquer comment à travers l’adhésion à l’atlantisme, elle a choisi d’accompagner sur le plan idéologique le retour de la droite et de l’extrême-droite. Dans le même temps où la vague néolibérale imposait le démantèlement des services publics, le renforcement des inégalités, les défaites ouvrières, elle acceptait une pédagogie de l’impossibilité du socialisme derrière des Robert Ménard (1).

 

Quoiqu’on me dise « stalinienne » j’ai toujours plaidé pour un véritable examen de ce qu’a été l’expérience socialiste du XXe siècle, mais je voulais que cet état des lieux parte de nos propres objectifs communistes qui ne se limitent pas à l’idéologie des droits de l’homme dont l’alpha et l’omega seraient les Etats-Unis, mais prennent en compte la poussée vers la justice sociale, l’égalité entre tous et l’émancipation humaine. Dans l’aggravation de la lutte des classes que nous vivons il sera difficile de prétendre à l’objectivité mais au moins ne déformons pas les faits, n’inventons pas des réalités dont nous ignorons tout, ne faisons pas confiance à des Robert Ménard.

 

Si j’ai longuement insisté sur ce cas que l’on peut considérer comme secondaire et il l’est par rapport au désastreux quinquennat et à la destruction de la gauche qu’il a représenté, il faut aussi mesurer que le PCF qui a toujours été la colonne vertébrale d’une véritable gauche a été sciemment attaqué dans le sillage de la fin de l’URSS. Ses dirigeants ont choisi de durer à travers des élus quitte à sacrifier le parti, les militants, leur formation, leur capacité d’initiative en en faisant de plus en plus une simple machine électorale. C’était un choix et nul ne peut le reprocher totalement mais il présentait le double inconvénient de nous soumettre à un PS qui non seulement voulait la fin du PCF mais n’avait aucune perspective autre qu’être les meilleurs gérants du capitalisme. De surcroît la ligne politique du parti était frappée d’opportunisme vu que comme chacun sait « on ne refait pas le terrain durant une élection, on l’utilise ». Une telle stratégie nous voue à une lente disparition et elle condamne l’ensemble de la gauche à une dérive impuissante telle que nous la voyons aujourd’hui. Ménard est à titre d’exemple le pivot d’un tel mouvement et sa stupéfaction devant son triomphe plein et total que représente l’alternative Fillon-Le Pen clôt la fable. Surtout si l’on considère que ses bailleurs de fond de la CIA ont abouti à l’alternative Clinton-Trump.

 

 

Est-il encore temps pour un tel plaidoyer, je le crois plus utile que jamais. Je ne crois pas que l’alternative Fillon Le Pen bannie par un Robert Ménard soit l’avenir pour le peuple français. D’autant que ce que décrivait déjà Marx (la clarté gauloise) et Politzer (le solide bon sens) n’est pas enveloppé dans les errances que depuis des années on tente de nous vendre comme le « progressisme » et qui nie la manière dont les êtres humains vivent de plus en plus mal sans bâtir des solidarités de combat entre ces valeurs progressistes et le droit à la santé, à l’éducation et à une vie décente, à l’emploi décent, à la dignité du travail. Robert Ménard n’est que le produit d’une telle coupure entre le social et le sociétal, dans un premier temps il a exaspéré les antagonismes, mené combat contre tout ceux qui subsistaient encore vivants au sortir de la guerre froide, puis il a pu tomber le masque et prôner la réaction dont il a toujours été le représentant.

 

Danielle Bleitrach

 

(1) On peut se moquer de Renaud passant de la contestation mais aussi du mitterrandisme échevelé à l’apologie de Fillon mais il ne suffit pas d’être un pochetron pour être passé de Robert Ménard à l’apologie de la politique de la droite en feignant d’être resté à gauche. Je voudrais encore préciser que je ne crois pas être plus « stalinienne » qu’anti-trotskiste. Sur ce dernier point simplement quand je vois non seulement un Cambadélis qui me fait m’interroger sur les vertus de l’entrisme, mais un Gérard Filoche dont je me dis: qu’est-ce qu’il doit être anticommuniste pour préférer être au PS qu’au PCF, j’aurais plutôt tendance à considérer tout cela comme un gâchis. Je crois avec Fidel que non seulement les divisions internes ont détruit le mouvement communiste international mais que le pire de tout dans ses conséquences a été la rupture entre la Chine et l’Union soviétique.

 

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