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Publié par Pour une vraie gauche à Lannion

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J’veux du soleil
samedi 6 avril 2019
Par
0 de Conduite
 

Tourné en six jours et monté en une poignée de semaines, J’veux du soleil est habité par un sentiment d’urgence. Urgence de voir et d’entendre, sans fard, ces femmes et ces hommes debout, croisés lors d’une virée du nord au sud du pays par le tandem Perret-Ruffin. Des hommes et des femmes qui tiennent depuis plusieurs mois toutes les formes de pouvoir dans une salutaire intranquilité.

J’veux du soleil est loin d’être un documentaire à thèse (politique), certains professionnels de la révolution ne manqueront d’ailleurs pas de critiquer l’absence d’une quelconque démonstration. Le duo signe avant tout un film de proximité tissé de rencontres au sein d’un environnement dégradé à l’image de ces vies cabossées : ronds-points, péages d’autoroute ou zones commerciales. Cependant, derrière ces visages fatigués qui se succèdent, ces vies humiliées qui se racontent, nul misérabilisme.

Au contraire, sur cette misère méprisée, niée, rendue honteuse par le pouvoir, des paroles s’éclairent. Des mots sont posés au fil des rencontres. Des mots qui énoncent un désir de collectif à reconstruire et une volonté de lutter. C’est, pour ce charpentier au chômage, « apprendre à se connaître » et tisser de la fraternité à un échangeur d’autoroute. C’est Khaled qui, sur le rond-point, retrouve une conscience de classe. C’est l’énergie de Cindy qui ne veut plus : « J’y vais, je fonce ».

Construire une cabane et la reconstruire encore, écourter sa nuit pour mettre en place un barrage filtrant, se mettre à lire la Constitution, le film saisit cette prise de vouloir en œuvre.

L’irruption de l’humanité vivante pointe au gré d’une dérive filmique et territoriale. Cette humanité perce derrière les souffrances sociales, captée à bonne distance par la caméra de Gilles Perret. Elle est l’exact contrepoint de l’idéal type du « gilet jaune » braillard, vulgaire et violent construit par les commentaires suffisants et infantilisants des éditorialistes de cours et de plateaux tv.

Réalisé avec une économie de moyens assumée, J’veux du soleil préserve à l’écran la vitalité des conditions d’un tournage abrupt. Le pari esthétique du film est finalement à l’image de ce portrait peint monumental et improbable de « Marcel » revêtant le gilet jaune, dressé au milieu de nulle part. C’est un film frontal et entêté dans la volonté de saisir une énergie vivante et rugueuse, celle d’une résistance populaire.

En complément du nocturne et urbain film de Matthieu Bareyre, L’époque ; J’veux du soleil est un film tout aussi nécessaire car il prend également au plus juste le pouls d’un peuple qui ne veut plus face à un pouvoir qui ne peut plus.

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