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Le 31 mars 2020, en pleine crise du coronavirus,depuis l’usine Kolmi-Hopen dans la périphérie d’Angers, après s’être autosatisfait de son bilan (désastreux) en matière de production de matériel médical (masques et gel hydroalcoolique en tête) au moment où la mortalité explose en France, Emmanuel Macron se lance dans un vibrant plaidoyer pour l’après-confinement : « le jour d’après ne ressemblera pas au jour d’avant ». Et d’affirmer la nécessité de retrouver la « souveraineté » industrielle démantelée depuis des décennies par les politiques euro-austéritaires de « totale liberté de circulation » (surtout des marchandises, des capitaux et des capitalistes), la « mise en concurrence » (ou plutôt : l’exploitation à échelle internationale) des travailleurs des pays membres de l’UE et au sein de la « mondialisation heureuse », la promotion d’une « économie de marché où la concurrence est libre et non faussée » – interdisant notamment les nationalisations des secteurs industriels stratégiques – ou encore le démantèlement de l’appareil productif au profit des fonds de pensions et multinationales rapaces états-uniens, à l’image de la « vente » d’Alstom (véritable scandale d’État) réalisée en 2015 par le ministre de l’Économie de l’époque, un certain… Emmanuel Macron.
Seulement voilà : le coronavirus a accéléré une situation économique désastreuse, et la verve mensongère du Tartuffe de la République s’efface rapidement – et logiquement – devant les « plans de sauvegarde de l’emploi » (sans rire !) qui se multiplient, malgré les nombreuses subventions étatiques grassement accordées à des dirigeants d’entreprises tout heureux de trouver un prétexte pour justifier les suppressions de milliers d’emplois de fait déjà programmées. Et comme chaque fois avec les euro-gouvernements, les paroles volontaristes ubuesques accompagnent la réalité du désastre social, comme le montre le cas d’école Arcelor-Mittal : Sarkozy n’avait-il pas promis de sauver l’emploi des ouvriers du site de Gandrange ? François Hollande ne s’était-il pas engagé à Florange ? Sans compter le nombre d’usines liquidées depuis plus de 15 ans au nom du tout-profit et de la « libre entreprise », avec la complicité des chiens de garde médiatiques sonnant l’hallali contre les travailleurs en lutte pour sauver leur emploi : Continental, Goodyear, Conti, Alcatel, PSA Poissy – dont la lutte a été excellemment retranscrite dans le film Comme des Lions –, Whirlpool, etc. : n’en jetez plus, la coupe est pleine.
Macron avait, quant à lui, clairement annoncé la couleur au moment de l’élection présidentielle de 2017 lorsque, se rendant sur le site de Whirlpool à Amiens, il expliquait ne rien pouvoir faire contre une fermeture d’usine. Alors faut-il s’étonner que, contrairement à tous les palabres serinés à satiété ces dernières semaines pour tenter de couper court à tout mouvement social d’ampleur, le « Monde d’après » de Macron prolonge (en l’amplifiant) le « Nouveau monde » – qui était toujours en réalité l’« Ancien monde » ?
Et les ouvriers de se retrouver désemparés face aux « plans de restructuration » (l’imagination sémantique du capitalisme ne connaît aucune limite) qui se multiplient. Renault en devient un premier symbole important début juin lorsque le groupe annonce la fermeture du site de Choisy-le-Roi (Val-de-Marne) … et ce malgré le prêt garanti de 5 milliards d’euros validé par le ministre de l’Économie et des Finances Le Maire pour aider le constructeur automobile à traverser la crise du coronavirus – ou comment engloutir d’énièmes subventions étatiques sans aucune contrainte sociale… Puis les annonces explosent dans tous les sens : le 22 juin, on apprend que Nokia France veut supprimer 1.233 postes (soit un tiers des effectifs d’Alcatel-Lucent) dont 2/3 à Nozay (Essonne) ; le 26 juin, Sanofi annonce la tenue d’un « Works Council européen » (en globish, naturellement) pour programmer la suppression de 1000 emplois ; le 27 juin, l’équipementier automobile états-unien BorgWarner annonce la suppression de 368 postes en Corrèze ; le 30 juin, Airbus annonce son intention de supprimer 15.000 postes d’ici l’été 2021 – dont un tiers en France, et près de 3.400 à Toulouse – dans le cadre d’un « plan de restructuration ».
Et la macronie dans tout cela ? Elle oscille entre condamnations de façade (Nokia), appui aux groupes (Renault, Sanofi), réunions sans intérêt (BorgWarner) et soutien aux licenciements (Airbus). Il est vrai que la solution la plus adaptée pour sauver l’emploi, la nationalisation, ne peut être envisagée par les illuminés euro-capitalistes à la tête du pays, même lorsque la santé de la population est en jeu : Luxfer, qui produit des bouteilles d’oxygène médical dont le pays a cruellement manqué ces derniers mois, en sait quelque chose, alors que le site de Gerzat près de Clermont-Ferrand est menacé de fermeture…
Plus que jamais, il est urgent d’arrêter la désindustrialisation massive appelée à s’amplifier dans les mois à venir en prenant des mesures d’urgence, parmi lesquelles la nationalisation des grands secteurs stratégiques de l’économie : transports, énergies, communication, grande distribution – Auchan n’avait-il pas annoncé la suppression de 517 emplois en janvier dernier ? –, recherche publique, barrages hydroélectriques – menacés de privatisation sous l’injonction de l’UE –, etc., sans oublier naturellement les banques et les assurances. Une mesure de salut public qui, pour advenir, nécessite d’en finir avec l’UE, l’euro et les instances de la mondialisation capitaliste (FMI, OMC, Banque mondiale).