Conflit en Ukraine, évolution des rapports inter-impérialistes et perspectives pour le mouvement populaire
Conflit en Ukraine, évolution des rapports inter-impérialistes et perspectives pour le mouvement populaire – 05 Août 2022
En hommage à la Révolution cubaine et au mot d’ordre du Commandant Fidel Castro « le socialisme ou mourir, nous vaincrons ! ».
https://www.initiative-communiste.fr/articles/international/conflit-en-ukraine-evolution-des-rapports-inter-imperialistes-et-perspectives/
Par Georges Gastaud – auteur de PATRIOTISME ET INTERNATIONALISME, éditions du CISC
Et Félix Crovisier – responsable de la commission géostratégie du PRCF
US Navy = danger
Tous les observateurs un tant soit peu honnêtes et intelligents – et l’usage de tels adjectifs exclut par avance 99% des médiacrates qui régurgitent sans relâche le « narratif » russophobe et grossièrement belliciste de l’OTAN – ont signalé cette évidence géopolitique :
La mainmise sur la planète des « gendarmes du monde » nord-américains, anglo-saxons et euro-atlantistes a certes quelque peu tremblé ces derniers temps. Que ce soit les oukazes d’un Trump, hystérique porte-drapeau d’un repli identitaire et raciste du milieu WASP, la puissante montée des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud), les échecs militaires répétés des États-Unis dans leurs guerres impérialistes ou dans leurs opérations de déstabilisation (Venezuela, Bolivie, Irak, Syrie, Afghanistan, Biélorussie…), le rejet populaire croissant de l’euro-mondialisation capitaliste et de la surconsommation des élites occidentales qui mène à l’extermination climatique, ou l’épidémie de Covid qui a mis en lumière l’insouciance sanitaire absolue des Trump, Bolsonaro,Johnson et autres figures de proue du néolibéralisme, tous ces facteurs ont discrédité la domination états-unienne au point qu’il devient courant, y compris dans les médias dominants parfois, de mettre en doute le monde unipolaire sous bannière états-unienne issu de la destruction du camp socialiste, et d’opposer à ce monde en faillite la perspective potentiellement majoritaire et consensuelle planétairement d’un nouveau monde dit multipolaire.
Au fond, la Charte de ce nouveau monde existe déjà et c’est celle qui s’est dessinée en 1945 avec la défaite du nazisme, dans laquelle l’Union soviétique avait, et de fort loin, joué le rôle militaire central, et qui s’est traduite alors par la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 et par la Charte de la nouvelle Organisation des Nations unies. Cette charte fondait la défense de la paix universelle sur la reconnaissance de la souveraineté des peuples, sur le refus des ingérences, sur l’égalité et sur la coopération culturelle, sanitaire, sociale, etc., des nations ; à ceci près que l’ONU, le plus souvent confisquée ou bloquée par les Etats-Unis, n’a jamais eu les moyens de fonctionner vraiment de manière libre et indépendante et que son mode de fonctionnement antidémocratique établit de fait une hiérarchie décisionnelle entre les “grandes” nations et celles qui ne peuvent que formuler des “avis” lors des Assemblées générales sans pouvoir décisionnaire.
Si la main a tremblé, les élites pseudo “démocrates” de Washington débarrassées, au moins provisoirement, du malséant trublion Trump, cherchent à tout prix à faire de nouveau la démonstration de leur domination sans partage sur le monde par la voie des rapports de forces, posant objectivement, qu’ils le veuillent ou non, les jalons d’une troisième guerre mondiale exterminatrice. Ce n’est évidemment pas que Washington cherche les voies directes d’un suicide généralisé : c’est que les faucons états-uniens, dont le chantage à l’extermination de toute l’humanité a si bien fonctionné en 1984 qu’il a suscité l’accès au pouvoir du super-liquidateur et pseudo “pacifiste” Gorbatchev en URSS, sont prêts à aller jusqu’à menacer le monde d’une conflagration générale menant à l’anéantissement universel si tel était le prix à payer pour sauver leur domination planétaire, et à travers lui, un système capitaliste-impérialiste de plus en incapable de régler les grandes questions du monde contemporain. Au contraire, ce système fondé sur la quête éperdue du profit maximal ne cesse d’aggraver les inégalités Nord-Sud et de dérégler l’ensemble des rapports sociaux et des liens humains au moment même où le monde a vitalement besoin de régulation, de coopération démocratique et de planification partagée (en un mot, de marche au communisme!) pour tenter de stopper, s’il en est encore temps, l’emballement climatique et les autres méga-désastres environnementaux en vue. C’est pourquoi il serait temps que les secteurs les plus avancés du Mouvement progressiste international, à commencer par les marxistes et les communistes, prennent conscience que oui, “l’exterminisme est le stade suprême du capitalisme-impérialisme” et que, en conséquence, s’applique de plus en plus à notre époque la devise révolutionnaire et objectivement anti-exterministe que nous a léguée Fidel Castro : “socialismo o morir, venceremos !” (le socialisme ou la mort, nous vaincrons !).
Cet impérialisme-hégémonisme mâtiné d’exterminisme presque assumé prend de plus en plus la forme odieuse de l’OTAN, laquelle s’engage militairement de façon de plus en plus flagrante et mondialement dangereuse au côté du régime fantoche et pro-nazi de Kiev tout en déclarant haut et fort son objectif antirusse, voire de l’extension de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord à la zone Indo-Pacifique (ce qui pose un petit problème de géographie…), où les provocations de l’Oncle Sam en Chine taïwanaise rendent le climat mondial explosif. C’est ce que vient de reconnaître – sans pouvoir sans doute pointer trop directement les responsabilités – le secrétaire général de l’ONU Antonio Gutierrez : il vient en effet de déclarer que le monde est à nouveau à cinq minutes d’une possible guerre d’anéantissement “à quelques malentendus près”. On est sidéré dans ces conditions de l’extrême sottise de l’écrasante masse des “éditorialistes” français qui excitent les chefs d’État, Macron en tête,
Les objectifs des américains
Mais l’ensemble de ces engagements ne visent pas uniquement Moscou et son grand allié chinois.
L’effet immédiat majeur du conflit russo-atlantique est de réaligner l’ensemble européen sur les exigences de Washington tout en percutant frontalement l’économie et l’industrie européennes sous domination allemande. En prenant la tête d’une croisade mondiale contre Moscou, la Maison-Blanche fait coup triple :
- Elle tente, en vain jusqu’ici, d’enfoncer un coin entre la Russie et la Chine populaire – laquelle a trop longtemps bénéficié de la mondialisation capitaliste pour s’engager d’un cœur léger dans une confrontation globale économiquement risquée ; cependant, comme l’Empire états-unien “attaque” directement ou indirectement A LA FOIS la Russie sur toute sa frontière occidentale et la Chine dans le détroit de Taïwan (alias Formose), l’agressivité insatiable et tous azimuts de Washington, principale force de déstabilisation de la paix mondiale à l’égal de Hitler ou de l’Empire japonais dans les années trente, ne peut que souder davantage les partenaires de l’Axe russo-chinois en formation ;
- Elle « fixe » la Russie et tente de relancer à son encontre la course aux armements qui avait largement ruiné et acculé l’URSS à la honteuse capitulation en rase campagne de Gorbatchev, puis de Boris Eltsine, les deux hommes les plus justement méprisés du public russe actuel au vu de leur bilan national et international proprement catastrophique (sauf pour la nouvelle oligarchie russe, qui bien entendu, les célèbre, et de la fausse gauche occidentale qui a perdu toute boussole de classe dans sa lecture de la lutte des classes.
- Enfin, l’équipe de Joseph Biden « marque à la culotte » son rival principal au sein de l’Alliance atlantique, cette RFA qui fut l’une des grandes gagnantes du processus contre-révolutionnaire piloté par le néo-munichois capitulard Gorbatchev, puis par le fantoche alcoolique Boris Eltsine. La politique atlantique de « sanctions », qui touche modérément les États-Unis dans un premier temps, sert aussi, voire surtout à dicter à Berlin des conditions globales de production et d’échange très désavantageuses avec le reste du monde et de l’Europe… Bref, comme toujours, les conflits entre le capitalisme-hégémonisme et les forces qui le contestent, servent aussi à “régler des comptes” à l’intérieur du bloc hégémonique lui-même.
1- A QUI PROFITE LE NOUVEL EURO FAIBLE ?
Déjà l’économie européenne, et notamment sa composante industrielle germanique prédominante, sont entrées en crise existentielle avec le torpillage américain des gazoducs transcontinentaux North Stream destinés à alimenter la RFA en gaz russe (1) Les “Verts” allemands (“die Grünen”), qui ont obtenu de Merkel la fermeture des centrales nucléaires allemandes et mis l’industrie de ce pays à la merci du gaz russe, puis qui, aujourd’hui, se prononcent fanatiquement pour le réarmement massif de l’impérialisme allemand et pour remettre l’Ukraine dans l’orbite de l’UE allemande (ça ne vous rappelle rien?) se comportent en Chevaux de Troie de Washington au sein de l’élite allemande. Le social-démocrate de gauche Oskar Lafontaine, qui fut l’un des cofondateurs de “Die Linke”, met subtilement en garde dans une récente déclaration ses ex-amis du SPD contre ces pseudo-écolos traîtres à la paix, à l’écologie politique (leur politique ouvre la voie aux gaz de schiste hyper-polluants venus des USA et, si une guerre mondiale et nucléaire finissait par éclater, à l’emballement définitif du climat!) et aussi… aux intérêts nationaux de la bourgeoisie industrielle allemande invitée à ramper devant le maître américain. [/box] . La politique de sanctions impulsée par Washington coupe l’Allemagne fédérale, et par elle, toute l’Union européenne, de leurs approvisionnements de proximité en hydrocarbures russes bon marché.
Les sanctions impulsées par Biden coupent aussi Berlin des exportations de capitaux en Russie et des débouchés commerciaux dans le « monde russe » (Biélorussie, Kazakhstan…). Cette politique unilatéralement décidée ouvre subsidiairement un large débouché aux gaz de schiste américains plus chers et plus polluants (bravo les « Grünen »!); elle réaligne largement sur les USA l’ « Hinterland » allemand composé des ex-pays socialistes européens (Tchéquie, Slovaquie, Pologne, Pays baltes, Hongrie, ex-Yougoslavie…) et de leur main-d’oeuvre ouvrière à bas coût.
Enfin, la ligne américaine dure de sanctions antirusses affaiblit fortement l’euro en remettant en cause, à l’initiative des États-Unis, l’accord monétaire crypto-protectionniste Berlin/Washington que le PRCF a été le seul à signaler en son temps. Cet accord entre grands financiers américains et germano-européens fut à la base du lancement de la monnaie unique européenne : il s’agissait de mettre en orbite un euro fort et aligné sur le Mark, protégé par la BCE et par la monnaie unique européenne des récurrentes dévaluations compétitives de la France et de l’Europe du sud, et protégeant les États-Unis des exportations allemandes en vertu de la faiblesse structurelle d’un dollar faible et inconvertible continuant à jouer seul le rôle de monnaie mondiale garantie par la puissance de frappe de l’US Army.
Certes, les marchandises allemandes seront moins chères d’un point de vue purement monétaire (étant donné la dévaluation de fait de l’euro), mais vu le renchérissement massif des coûts de production allemands qui résultent du durcissement du conflit en Ukraine (les États-Unis crucifiant sur place toute chancellerie qui parlerait de négocier avec Moscou et les « Verts » se chargeant, à Berlin, de relayer la moindre exigence otanesque en déployant leur bellicisme échevelé), Wall Street et l’industrie US ne risquent pas de trembler pour si peu, du moins dans un premier temps…
Par sa propre faute, l’impérialisme allemand est donc, pour le moment du moins, globalement perdant dans le conflit dit russo-ukrainien. Lequel est en réalité un conflit géopolitique majeur entre l’Imperium euro-atlantique recentré sur le quartette anglo-saxon (Washington-Londres-Canberra-Ottawa) et le bloc informel des B.R.I.C.S. conduit par le duopole plus ou moins stabilisé Moscou/Pékin, lui-même suivi de près ou de loin par toute une série de pays asiatiques, africains et latino-américains qui supportent de moins en moins l’arrogant unilatéralisme nord-américain.
2- CRISE(S) POLITIQUES EN CASCADE EN EUROPE
D’où le fait que la politique allemande, longtemps personnifiée par la figure rassurante de « Mutti » Merkel, est entrée dans une zone de forte turbulence. Non seulement les deux partis dominants également atlantistes, chrétiens-démocrates et sociaux-démocrates, ne rallient plus à deux la majorité de l’électorat, non seulement le SPD à peine revenu au pouvoir essuie échec électoral sur échec électoral, non seulement les « Grünen » – jadis pacifistes et neutralistes – se comportent à tous coups, par incapacité radicale d’analyser les conflits en termes de classes – en cinquième colonne volontaire ou pas de Washington, mais 90 députés ultranationalistes et nostalgiques d’Adolf Hitler siègent désormais au Bundestag.
D’où le fait aussi que l’Italie, troisième économie de la zone euro, tangue de plus en plus car Draghi, l’homme de l’oligarchie européenne et des États-Unis, souffre terriblement de la situation économique actuelle. On sait par ailleurs que ses deux forces politiques dominantes, depuis l’auto-liquidation du PC italien et de la Démocratie chrétienne, sont eurosceptiques, qu’il s’agisse de la Ligue de Salvini (qui n’a jamais caché son admiration pour Poutine) ou qu’il s’agisse de la « gauche » (il faut le dire vite…) des Cinq Etoiles.
Quant à la France, nous avons montré par ailleurs (cf l’article de G. Gastaud intitulé « De l’intelligence collective du peuple »), à propos du résultat détonnant des législatives françaises, qu’elle est entrée dans une période aiguë de turbulence sociopolitique (annoncée par la crise non résolue des Gilets jaunes) où, selon l’expression bien connue de Lénine, « ceux d’en haut peuvent de moins en moins diriger comme avant », tandis que « ceux d’en bas veulent de moins en moins être dirigés comme avant ».
3- A LA FIN, C’EST LA FRANCE CAPITALISTE EN DECLIN QUI PAIERA LA NOTE…
Ne croyons pas pour autant que l’Allemagne impérialiste se trouverait dans une situation continentalement et mondialement désespérée. En pastichant une expression fameuse d’ordinaire réservée au football, la géopolitique est un sport de combat où tous les coups sont permis et où, en définitive, c’est toujours au final la France bourgeoise en déclin qui perd : un peu à la manière des malheureux frères Volfoni dans le film-culte Les Tontons flingueurs !
En effet, l’impérialisme allemand « se console » déjà de sa déconfiture économique provisoire par le fait que l’affaire russo-ukrainienne lui a donné l’occasion en or de se réarmer fortement, de doubler son budget militaire, de construire à terme l’armée conventionnelle la plus forte d’Europe, donc de damer le pion à Paris sur le dernier terrain où l’impérialisme français, héritier de la force de frappe nucléaire gaullienne, pouvait encore parler haut et fort à son « partenaire » (et rival) berlinois.
Très certainement, Berlin va demander de plus en plus fort que la France cède à l’UE, c’est-à-dire à Frau Ursula von der Leyen, son siège permanent au Conseil de sécurité de l’ONU, puis que Paris « partage » officiellement sa force de frappe avec Berlin en affirmant solennellement – ce que le néo-Munichois Macron brûle de faire ! – que la force nucléaire française « couvre » désormais l’ensemble du territoire européen et plus seulement la défense de l’Hexagone comme l’avait voulu De Gaulle (ce qui ferait de Paris la cible privilégiée de tirs nucléaires russes de représailles si, en Ukraine, les canons français « Caesar » percutent trop fortement les lignes russes…).
Gageons aussi que Berlin va exiger une triple ration d’austérité salariale pour stabiliser et relancer l’euro-mark et pour faire payer au maximum à ses voisins du Sud, France incluse, la facture de la guerre ukrainienne. La feuille de route de la Commission européenne et ses exigences de « réformes » sont désormais publiques et ceux qui feignent de se demander « ce que va faire Macron II » ne cultivent qu’un suspense de carton-pâte: ça va de nouveau saigner, pour les salariés, pour les paysans français, pour les services publics français déjà exsangues. Bref, l’ « hégémon » mondial nord-américain et l’hégémon » régional allemand vont à nouveau tenter de s’entendre, non seulement aux dépens de la Russie, mais au détriment des peuples européens de l’Est et du Sud, dont la France surendettée fait désormais partie, sans parler de l’Italie en faillite virtuelle.
Enfin, comment ne pas voir qu’en Allemagne, nombre de nostalgiques de droite et « de gauche » (sic) se sont remis à rêver – sous couvert de « défense des droits de l’homme », on aura tout vu ! – d’une revanche possiblement militaire de l’impérialisme germain sur le pays de Koursk et de Stalingrad ? N’est-ce pas le ministre vert des Affaires étrangères Joschka Fischer qui, toute honte bue, déclarait naguère que la « construction européenne » était désormais le meilleur moyen pour l’Allemagne d’atteindre en souplesse ses objectifs géopolitiques que les méthodes grossières de Guillaume et de Hitler n’avaient pas permis d’atteindre en leur temps ? Et n’est-ce pas l’aristocrate Von Thaden, jadis chargé par Berlin du suivi de la politique franco-allemande, qui déclarait en son temps sous les applaudissement du député vert de Francfort Daniel Cohn-Bendit : « faire l’Europe, c’est un peu défaire la France » ?
4- RESISTANCES POPULAIRES PREVISIBLEMENT A LA HAUSSE
Mais les oligarques bruxellois et leurs proconsuls nationaux pourront-ils totalement mettre en application ce nouveau Blitzkrieg économique contre les peuples européens, y compris contre la classe ouvrière allemande désormais très menacée de délocalisations massives ? Rien n’est moins sûr.
En Italie, la politique suicidairement antirusse de Draghi ne « passe » plus malgré le soutien médiatique massif dont fait l’objet ce prétendu « technicien » chouchouté par toute la caste médiatique européenne. De manière confuse en l’absence d’un grand PC italien assumant à la fois la relance du progrès social, la défense de la paix et l’indépendance nationale du pays de Garibaldi, le peuple italien et la classe ouvrière transalpine sont en rébellion larvée contre un ordre politique qui ne cesse d’humilier leur pays tout en réduisant les droits sociaux résultant de la victoire sur le fascisme. Les forces populaires italiennes sauront-elles alors éviter le dévoiement pseudo-patriotique que leur propose l’extrême droite néo-mussolinienne des « Fratelli d’Italia » ? Élément très intéressant pour le renouveau de la lutte anti-impérialiste en Europe, les dockers italiens ont retrouvé leurs grandes traditions internationalistes quand ils ont, notamment à Gênes, empêché le chargement d’armes occidentales destinées au régime pro-nazi de Kiev. Non la classe ouvrière rouge d’Italie, elle qui avait fait du PCI le premier parti de la Péninsule avec 33% des voix, pourrait-elle totalement avoir oublié Togliatti, Gramsci et Luigi Longo ?
En Allemagne même, la politique de « cogestion » (« Mitbestimmung » = collaboration de classes entre le grand capital industriel et les syndicats inféodés au SPD) aura de plus en plus de mal à s’imposer d’autant qu’il faudra de plus en plus partager, non pas des bénéfices, mais des sacrifices imposés aux travailleurs. Une occasion de saluer les marxistes-léninistes allemands qui, se détournant des contorsions euro-complaisantes et atlantico-compatibles de « die Linke » – tentent de reconstituer un parti communiste de masse dans ce pays en dépit des tentatives permanentes de persécution anticommuniste qui les visent. N’oublions pas que l’Allemagne n’a pas seulement été le pays de Bismark, du Kaiser Guillaume et d’Adolf Hitler au XXème siècle. Elle fut aussi le pays de Marx et d’Engels, de Clara Zetkin, de Karl Liebknecht et de Rosa Luxemburg, le pays d’Anna Seghers et de Bertolt Brecht et celui des grands résistants à Hitler que furent Ernst Thälmann et Erich Honecker…
En France, pourquoi notre peuple – qui a largement délégitimé Macron lors des dernières élections (majoritairement boudées par la classe ouvrière et par la jeunesse) et qui n’a pas digéré le viol grossier par ses « élites » du Non à l’euro-constitution – accepterait-il à l’infini la politique de décomposition nationale, de détricotage républicain, la guerre larvée contre la Russie (« qui a joué le rôle principal dans notre libération » comme le reconnaissait De Gaulle en 1944), la désertification industrielle et agricole, la casse définitive des retraites et de la Sécu, la mort programmée de l’Éducation nationale et de l’hôpital public, bref, ce « saut fédéral européen » que Macron veut programmer en accord avec Scholz et en violation flagrante de la Constitution qui dispose que « la souveraineté réside essentiellement dans la Nation » ? Au pays de la Révolution française, de la Commune, du Front populaire et des Francs-Tireurs et Partisans de France, l’oligarchie « française » traîtresse à son pays sinon à la mondialisation de ses profits, sait parfaitement qu’une « grande explication » l’attend cet automne avec un peuple français qui veut massivement l’augmentation des salaires et qui refusent très majoritairement la retraite à 65 ans réclamée par Bruxelles. Aux communistes véritables de s’organiser et de s’unir pour porter ensemble une ligne de rupture intégrale avec l’UE au lieu de se confiner dans un dialogue stérile et perdu d’avance avec la direction euro-alignée d’un PCF devenu une pure et simple force d’appoint d’une « NUPES » alignée sur les livraisons d’armes de l’OTAN et qui ne dit pas un seul mot contre la politique macroniste de « saut fédéral européen ». Aux syndicalistes de classe de se coordonner et d’agir sans se subordonner à une direction CGT de plus en plus complaisante envers la CFDT et la Confédération Européenne des Syndicats présidés toutes deux par le jaune en chef Laurent Berger. Aux Gilets jaunes aussi de comprendre que le drapeau tricolore de la Révolution française ne triomphera pas de la bannière bleue de l’UE néolibérale sans s’allier à nouveau, comme en 1936 ou en 1945, à la bannière rouge internationaliste du monde du travail.
5- COMBATTRE LA NOUVELLE SAINTE-ALLIANCE EURO-FASCISANTE
Bref, l’UE atlantique et supranationale ne peut qu’entrer dans une nouvelle zone de tempêtes et de turbulences: nos « élites » violentes et cruelles le savent pertinemment et se préparent au choc de deux manières :
- en fascisant les appareils d’Etat et en les disposant à une répression sans précédent sur fond d’anticommunisme et de chasse aux sorcières « pro-russes » continentale,
- mais aussi en s’efforçant d’échapper à la colère des peuples par la mise en place rapide d’un État fédéral européen (l’expression est d’Olaf Scholz) – en clair, d’un EMPIRE continental – permettant si besoin à chaque oligarchie « nationale » menacée par « son » propre peuple de recourir aux services répressifs d’une nouvelle Sainte-Alliance européenne.
Telle est l’Internationale, ou plutôt, la Supranationale capitaliste, dont le rôle historique est, comme le faisait jadis l’Europe contre-révolutionnaire et anti-française du chancelier autrichien contre-révolutionnaire Metternich (architecte de la Restauration monarchique en Europe suite à la défaite de la France bonapartiste), de régler leur compte aux insurrections populaires nationales dont le temps revient inéluctablement à la faveur de la méga-crise économique et de l’hyper-inflation qui menace partout durement les conditions de vie de la classe ouvrière et d’une bonne partie des couches moyennes.
6- WALL STREET N’EST PLUS LE CENTRE DE GRAVITE DU MONDE !
En définitive, c’est à eux, les oligarques occidentaux, d’avoir peur et non pas à nous, les militants du mouvement populaire français et international.
Non seulement parce que, à l’échelle mondiale, les luttes prolétariennes remontent très fort (cf les immenses grèves ouvrières et paysannes de l’Inde, avec à leur tête les militants communistes indiens arborant cet emblème ouvrier et paysan qu’a renié le « camarade identitaire » Roussel). En Europe même, on assiste en ce moment même au grand réveil du prolétariat britannique (grève massive des cheminots en plein été) qui a bien fait de se débarrasser du carcan européen de manière à pouvoir affronter seul à seul sa bourgeoisie réactionnaire. En France, malgré l’interminable sommeil des dirigeants confédéraux asservis à la Confédération Européenne des Syndicats (anti-lutte de classes et pro-Maastricht), Macron et sa roue de secours “LR” (droite classique) se voient forcés de multiplier les bricolages marginaux sur le pouvoir d’achat pour éviter l’augmentation générale des salaires… et la grande explication sociale qui ne saurait tarder entre son pouvoir largement délégitimé (l’écrasante masse du monde du travail a boycotté purement et simplement les législatives et le chef de l’État est en réalité illégitime aux yeux de la majorité de la population!) et le monde du travail lassé des politiques destructives (privatisations, délocalisation, déprotection sociale…) planifiée par Bruxelles et mises en œuvre avec zèle par les proconsuls de l’UE que se sont révélés être en réalité les Sarkozy, Hollande et autre Macron.
En outre, la gauche populaire reprend des couleurs à l’exemple de Cuba socialiste et repart à l’offensive dans toute l’Amérique latine (Pérou, Chili, Colombie, Honduras…) sans crainte de narguer Biden et Trump; les bataillons ouvertement nazis Azov et Aïdar ont été proprement humiliés et nettoyés en Ukraine; la majorité des pays du monde, par exemple l’Afrique, l’Indonésie et l’Amérique latine, ne semble absolument pas décidée à « marcher » dans l’aventure euro-atlantiste d’une troisième guerre mondiale qui signifierait la mort de l’humanité (rappelons que, par leur population, les pays du bloc euro-atlantique qui s’auto-proclament « Communauté internationale » avec la constante complicité de journalistes-larbins, représentent moins d’un dixième des huit milliards d’humains).
Quant à la masse de la jeunesse mondiale mortellement inquiète pour son avenir, comment suivrait-elle éternellement les pseudo-« Verts » allemands, français ou autres qui palabrent contre le réchauffement climatique tout en poussant à la roue une politique militaire anti-chinoise et antirusse insensée qui peut à tout moment provoquer l’hiver nucléaire qui suivrait nécessairement une guerre mondiale provoquée par la politique atlantique mondiale d’encerclement de la Chine, de la Russie et désormais à nouveau, de la Serbie, “punie” pour son soutien aux Russes (qui doute une seconde que le harcèlement dont sont de nouveau victimes les Serbes du Kosovo n’ait été pour le moins concertés entre le régime otanien fantoche de Pristina et se maîtres euro-atlantistes) ?
7- LE SOCIALISME-COMMUNISME DE NOUVELLE GENERATION FACE A L’HEGEMONISME EXTERMINISTE
De plus en plus s’ouvre donc devant nous une période de larges affrontements anti-exterministes, anti-hégémonistes, anti-impérialistes, antifascistes, et en dernière analyse, anticapitalistes puisque l’hégémonisme, l’impérialisme et l’exterminisme, comme la fascisation, sont en dernière analyse les symptômes hautement toxiques de l’agonie historique du mode de production capitaliste globalement obsolescent.
Décidément, la lugubre période contre-révolutionnaire des années 1980/1990 marquée par l’auto-liquidation sous influence occidentale, social-démocrate et révisionniste de l’URSS, de la RDA et du camp socialiste européen, et par la montée concomitante de l’UE atlantiste, néo-impériale et supranationale de Maastricht, n’a pas clôt, bien au contraire, l’ère des révolutions prolétariennes et anti-impérialistes jadis ouverte par la Révolution d’Octobre.
A une condition toutefois: il faut que les communistes, que les syndicalistes de classe, que les forces réellement patriotiques (à distinguer radicalement de l’euro-nationalisme otano-compatible de l’extrême droite européenne et française. Sa montée est inséparable de la fascisation galopante du continent et du recyclage des néonazis qu’autorise la croisade russophobe, cette revanche sur Stalingrad, de Kiev à Vilnius en passant par Budapest… et Berlin), que les véritables amis de la paix et de l’environnement s’organisent de manière autonome en secouant la tutelle délétère, honteuse et mortifère des courants opportunistes, révisionnistes et renégats qui, depuis plus de quarante ans, avec leurs “Gorby”, leurs Berlinguer, leurs Robert Hue, Buffet, Laurent et Cie, n’ont rien fait d’autre que désarmer idéologiquement le mouvement ouvrier tout en faisant la courte échelle à l’ennemi mortel des peuples, du climat et de la paix: le capitalisme-impérialisme-hégémonisme-exterminisme flanqué de ses outils institutionnels les plus dangereux que sont l’OTAN, le G7, l’Union européenne, le FMI, etc.
Plus que jamais, chercher à « amender » à la marge ces institutions de mort relève de l’illusion suicidaire et nombre de membres de la “nouvelle gauche” française devraient s’en persuader pendant qu’il en est encore temps.
Plus que jamais, pour s’en sortir, l’humanité devra sortir de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme. Plus que jamais, si elle y reste, oui, au sens fort du mot, « elle y restera” !
(1) Les “Verts” allemands (“die Grünen”), qui ont obtenu de Merkel la fermeture des centrales nucléaires allemandes et mis l’industrie de ce pays à la merci du gaz russe, puis qui, aujourd’hui, se prononcent fanatiquement pour le réarmement massif de l’impérialisme allemand et pour remettre l’Ukraine dans l’orbite de l’UE allemande (ça ne vous rappelle rien?) se comportent en Chevaux de Troie de Washington au sein de l’élite allemande. Le social-démocrate de gauche Oskar Lafontaine, qui fut l’un des cofondateurs de “Die Linke”, met subtilement en garde dans une récente déclaration ses ex-amis du SPD contre ces pseudo-écolos traîtres à la paix, à l’écologie politique (leur politique ouvre la voie aux gaz de schiste hyper-polluants venus des USA et, si une guerre mondiale et nucléaire finissait par éclater, à l’emballement définitif du climat!) et aussi… aux intérêts nationaux de la bourgeoisie industrielle allemande invitée à ramper devant le maître américain.